Marc Dauphin et Christine Gauthier sont les co-auteurs de l'heptalogie Plus jamais la guerre. Les trois premiers volumes sont disponibles en librairie.
QPourquoi devrait-on absolument lire votre livre ?
RNotre dernier livre a été publié le 1er février 2017. Nous venons de publier, en quelques mois, les trois premiers volumes d'une heptalogie relatant l'histoire d'une famille allemande à travers la Deuxième Guerre mondiale.
Dans une Allemagne blessée au sortir de premier conflit mondial, la famille Kempfe essaie de renouer avec ses rêves de bonheur. Josef, le père, qui, à l'automne de 1918, rentre du front Ouest, est un homme brisé par quatre années d'enfer. Il découvre alors la misère dans laquelle ont été tenus tous les civils, dont, évidemment sa femme et ses deux fils, alors que lui s'entêtait à survivre dans les tranchées du plus grand charnier du monde. La paix sera-t-elle aussi exigeante que la guerre? Vivez l'après Grande Guerre et l'entre-deux-guerres avec notre famille allemande pour apprendre ce qui a poussé ce peuple à recommencer en 1939.
De se mettre dans la peau des Allemands sans caricature, en adoptant leur mentalité, en tenant compte de leur bagage social et historique a été un immense défi et a représenté plus de vingt-cinq années de recherche, incluant trois séjours en Allemagne d'au total plus de quatre ans. Christine est détentrice d'un diplôme d'infirmière et d'un bac en études allemandes. Marc est médecin, spécialisé en médecine d'urgence. Il a travaillé aux soins intensifs et à bord des aéronefs des Forces armées canadiennes. Vétéran décoré de l'Afghanistan, il a été, en 2009, le dernier officier-commandant canadien de l'Hôpital international de Rôle 3 de Kandahar, en Afghanistan. Pendant ses quelque 39 années de service militaire, ce passionné d'Histoire a eu l'occasion de servir dans toutes les armes et presque tous les environnements. Il connait intimement les sensations et les émotions des combats, que ce soit à bord du cockpit d'un chasseur ou dans la boue, la pluie, le froid et l'obscurité la plus profonde.
QVers quel âge avez-vous commencé à écrire ? Quel a été l'élément déclencheur ?
RGrand romantique, Marc a commencé à écrire à dix-sept ans, à la suite d'une peine d'amour ! Sa tante journaliste Louise Lamarre fut pour lui son premier mentor. Elle a tout de suite remarqué le talent du jeune homme malgré l'immaturité de ses écrits. Marc a donc décidé de prendre une pause et de reprendre la plume vingt ans plus tard. Pour sa part, Christine a fait un retour aux études à quarante ans, à l'Université anglophone Bishop's à Lennoxville. Comme francophone, elle a dû prendre un cours de rédaction anglaise afin de se mettre à niveau avec la langue de Shakespeare. C'est alors que son immense talent s'est révélé au monde. En vraie disciple de Hemingway, Christine est capable de vous saisir à la gorge en quelques lignes. Comme elle était déjà collaboratrice de l'œuvre, Marc lui a demandé de le joindre et c'est à deux que s'est continuée cette grande aventure.
Inspirés des romans de Erich-Maria Remarque, nous tentons de garder notre prose simple et claire surtout dans le traitement aussi sérieux et dramatique d'un contexte de guerre. Nous avons opté pour l'utilisation du narrateur omniscient par l'insertion, au début de chaque chapitre, de notes historiques extraits des livres d'Histoire.
QRacontez-nous un tournant de votre carrière.
RCe qui a profondément influencé Marc est un événement en deux temps. À la fin des années 70, Marc, qui s'était enrôlé dans les Forces Armées canadiennes pour payer ses études et qui était maintenant officier et médecin, a été envoyé servir dans une unité de l'armée allemande comme officier d'État-Major. C'est là qu'il a fait la rencontre des vétérans allemands de la Deuxième Guerre. Après avoir écouté pendant des heures les récits de ces militaires, Marc, les yeux et les oreilles écarquillés, entendait pour la première fois des faits inconnus et inédits des exploits allemands. Ce n'est que lors de la chute du rideau de fer, en 1989, alors que des historiens occidentaux se ruaient vers l'est pour accéder aux archives de l'armée allemande gardées secrètes par les Soviétiques et les Allemands de l'Est, et que des comptes-rendus plus complets de la guerre sont publiés, que Marc réalisa que toutes ces anecdotes racontées par les vétérans plus de vingt ans plus tôt, avaient été vraies et que personne ne les avait crus, tant l'Histoire officielle, occidentalisée par les vainqueurs, s'était avérée incomplète. Sous le coup d'un profond sentiment d'injustice, Marc commença la planification et la rédaction de cette fresque : Plus jamais la guerre.
QDe quoi êtes-vous le plus fier ? Avez-vous un mentor ?
RDe trois choses :
1-La publication, en 1998, aux Éditions Libre-Expression, de L'anneau de Gabriele, réédité et republié en 2016 sous le titre Plus jamais la guerre, T.1 L'anneau a été une grande joie pour nous deux. De voir son nom sur la couverture d'un roman, aller à la rencontre de son public nous a définitivement changés et a aidés à nous préparer à une carrière d'écrivains. Nous devons une fière chandelle à monsieur André Bastien, fondateur de la maison Libre Expression, pour avoir eu la patience de nous expliquer les méandres de la création littéraire.
2-Nos personnages sont parfois forts, parfois faibles, avec leurs défauts et leurs qualités, ce qui les rend crédibles aux yeux des lecteurs. Ils sont comme la plupart de nous : vrais.
3-Nous sommes aussi très fiers de notre documentation historique impeccable et rigoureuse. Pas d'approximations : si c'est écrit, vous pouvez être certains que ça s'est produit.
QÊtes-vous influencés par les gens autour de vous pour créer vos personnages ?
RIl est impossible de créer des personnages fictifs sans y ajouter des traits de caractère de gens que nous avons côtoyés. Amis d'enfance, mentors, amant(e)s passé(e)s, professeurs, camarades militaires ou de classe, membres de nos familles, patients ou même, autres personnages fictifs sont des influences conscientes ou non. De plus, chaque auteur s'identifie à ses personnages. Ainsi, Marc se projette dans la peau d'Emil, le second fils révolté, impulsif et aventureux de la famille Kempfe, de même que dans Heinrich le fils aîné, docile, bon, doux, mais qui deviendra un tueur naturel au front. Il y a aussi de Marc dans cet oncle général, irascible et de peu de paroles. Christine se reconnait dans Gabriele, la mère aimante, qui garde sa famille blottie autour d'elle malgré la famine, et malgré son mari atteint de que nous appelons aujourd'hui le syndrome de stress post-traumatique. Et l'on retrouve aussi chez Magdalene, la tante Magda au caractère fougueux, le tempérament latin de Christine…
QQuelle est votre routine d'écriture ?
ROn nous demande toujours comment nous arrivons à écrire à quatre mains. Nous commençons par établir l'histoire, les moments forts. De là surgiront les chapitres. Puis, nous nous séparons la rédaction. Une fois le manuscrit lancé, nous travaillons chacun le chapitre de l'autre, suggérant, modifiant, précisant, ajoutant, biffant, même. Surviennent alors de grands moments d'inspiration devant la porte ouverte par l'autre, le tout discuté au-dessus de l'apéro, agrémenté de rires et de high-fives ! Puis, nous reprenons les chapitres dont nous avions la responsabilité et enfin, c'est Marc qui révise la version finale afin que le style soit uniforme sans l'empreinte évidente de l'un ou de l'autre. C'est Marc qui est chargé des corrections et des relations avec le personnel technique de la boîte.
QQu'aimez-vous le plus dans le métier d'écrivain ?
RUne des choses que Marc aime le plus, dans ce métier, c'est la découverte des personnages et des détails de l'action à mesure que l'histoire avance. Ce qu'il préfère, c'est de lire les textes de Christine ou ses propres textes révisés par elle et dans lesquels cachent des surprises insoupçonnées.
QQui est votre auteur préféré ?
RLes auteurs préférés de Marc sont Erich-Maria Remarque, Georges Duhamel, Michel Tremblay, Len Deighton, Pierre Berton, Doris Kearns Goodwin, François Bourgeon, Hermann, Michael Connelly, Ernest Hemingway, Richard M. Watt, Leon Uris, Stephen King, Boris Vian, JK Rowling, James Clavell, Nelson Demille, John Toland, Émile Zola, Albert Camus, Roger Vercel, Marcel Pagnol, Verlaine, Rimbaud et Beaudelaire.
QParlez-nous d'un livre marquant de votre jeunesse.
RÀ l'Ouest rien de nouveau d'Erich-Maria Remarque a littéralement marqué la vie de Marc. L'écume des jours de Boris Vian a, lui aussi, laissé une forte empreinte sur le jeune adolescent de 1970, de même que Les camarades d'Erich-Maria Remarque (Die drei Kameraden), un remake allemand de La dame aux Camélias, sis pendant l'inflation catastrophique de 1923. Ces deux derniers romans ont cimenté chez lui le désir d'exprimer la passion amoureuse par des mots simples et puissants.
QNommez un livre que vous aimez, qui n'a pas eu beaucoup de visibilité et qui en aurait mérité plus.
RThe Caine Mutiny (Ouragan sur le Caine, Herman Wouk) et Word of Honor (Nelson Demille) sont des romans forts, à l'atmosphère noire, qui ne sont pas reconnus à leur juste valeur encore aujourd'hui. Ces deux œuvres devraient faire partie du curriculum littéraire. Elles nous apprennent que tout ce qui brille n'est pas d'or, comme le dit l'expression consacrée. C'est d'ailleurs une des forces de Christine, de présenter un fait puis de rajouter les pièces qui manquent au puzzle, pour en tirer le maximum de surprise et d'effet émotif. A Painted House de John Grisham représente pour nous la quintessence du grand roman américain. Malheureusement, ce roman est passé sous le radar de plusieurs lecteurs.
Le livre préféré de Marc, Goodbye Mickey Mouse de Len Deighton.
Pour sa part, Christine se sent attirée par les œuvres émotives et descriptives. Germinal, roman puissant de Émile Zola l'a particulièrement touchée alors qu'elle était encore étudiante en soins infirmiers au Collège de Chicoutimi en 1971. La misère humaine, l'injustice sociale sont des thèmes importants pour elle. Frank McCourt, auteur Des cendres d'Angela, a eu un impact profond dans sa vie. En plus de la misère et l'injustice, on y retrouve la douleur et la détresse des enfants, et cela pour elle est intolérable. Marcel Pagnol, quant à lui, raconte avec des mots simples et efficaces, la vie quotidienne d'un petit garçon passant ses étés dans une maison de vacances dans le sud de la France. Le lecteur se sent envahi par les odeurs de romarin, de lilas et de miel. Écriture efficace et prenante. Quel beau voyage au pays de Pagnol !
QNommez un livre que vous n'avez pas lu et que tout le monde a lu.
RMarc : Je m'étais promis de lire, après avoir vu le film à quelques reprises, To Kill a Mockingbird de Harper Lee. Je l'ai fait l'an dernier et je comprends maintenant la force de l'écriture de cette auteure américaine.
QCitations préférées (Marc)
R-Ce n'est pas le navire qui compte, c'est le sillage. (Marc-Aurèle Fortin)
-La vie ce n'est pas d'attendre que l'orage passe, c'est d'apprendre à danser sous la pluie. (Sénèque)
-Et la plus courte nouvelle de l'histoire : « For sale : baby's shoes. Never worn. » (Ernest Hemingway)
QUn livre que vous auriez aimé écrire.
RMarc aurait aimé écrire Bomber de Len Deighton. En quelques centaines de pages, Deighton réussit à dépeindre des personnages puissants auxquels on s'attache immédiatement, et à les faire évoluer dans la pire des horreurs, en illustrant, à l'aide de ces protagonistes des deux côtés, la catastrophe qu'est une guerre moderne. C'est un roman qui ne laisse personne indifférent. C'est ce que nous avons tenté de faire dans le Tome 2 de notre série.
QNos films fétiche
RLa liste de Schindler, Forrest Gump, The Fifth Element.
QSérie télé préférée
RChristine : Downton Abby. Marc : Game of Thrones.
QChanteurs préférés
RSerge Lama, Reggiani.
QGroupes préférés
RHeart, The Beatles
QAnimal préféré
Rchien. Labrador de préférence.
QSport préféré
Rla marche et le zumba pour Christine.
QMets préféré
Rsteak, pommes frites, salade fraîche, vin rouge. Une bonne pizza fait toujours le bonheur de Christine.
Le livre de fiction historique nous permet définitivement d'inventer les lieux, les sons, les odeurs et les couleurs, faisant de l'Histoire notre histoire.
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